Appelé King Cocktail, l’américain Dale DeGroff est l’un des barmen les plus réputés du monde. Dès les années 90, il a su donner au cocktail ses lettres de noblesse en retravaillant des recettes classiques.
Dale DeGroff, un acteur en devenir
Né à Rhode Island en 1948, Dale DeGroff arrive à New York en 1969 avec le rêve de devenir acteur. Il commence finalement par travailler pour une agence de publicité qui lui ouvre la porte de hauts lieux de la vie nocturne newyorkaise. Il a la chance d’être l’un des derniers de sa génération à connaitre les luxueux bars à cocktails traditionnels. Mais ces derniers sont vite remplacés par une nouvelle vague de bars misant plus sur le volume que sur la qualité.
La légende raconte que Dale est passé de client à barman de façon inopinée. Alors qu’il sirote un verre au Charley O’s, une adresse réputée de la ville, il voit le gérant accourir, paniqué. Ce dernier doit assurer une prestation chez le maire de New York mais son barman n’est pas au rendez-vous. Bien qu’il n’ait aucune expérience derrière le bar mais fort de ses talents d’acteur, Dale propose ses services. La soirée est une réussite et le jeune homme se découvre une passion qui ne le quittera plus.
Les débuts d’un barman d’exception
Abandonnant ses velléités de devenir artiste, il part donc à Los Angeles faire ses classes à l’Hôtel Bel-Air. Il y reste six ans. Le lieu est malheureusement peu fréquenté et sa principale mission est de lustrer les bouteilles sur les étagères. Cette tâche rébarbative devient pour notre barman l’occasion de lire en détail chaque étiquette. Il se forme ainsi sur les produits qu’il utilise. Il profite également de ses temps libres pour étudier de nombreux livres sur le cocktail afin de parfaire sa culture.
En 1985, Joseph Baum, le propriétaire du Charley O’s le contacte. Il souhaite en effet l’intégrer à l’équipe de son nouveau restaurant Aurora à New York. Dale DeGroff possède deux qualités qui lui paraissent indispensables : une prestance développée par son attrait pour le théâtre et une bonne connaissance du bar tel qu’il était encore pratiqué dans la première moitié du vingtième siècle. L’objectif du restaurateur est de recréer un bar classique. Il veut servir des cocktails de qualité, loin des boissons industrielles et trop sucrées alors en vogue.
Dale DeGroff et le Rainbow Room
Cette expérience est l’antichambre d’un projet encore plus ambitieux : en 1987, Joseph Baum ouvre le Rainbow Room, au soixante-cinquième étage de la tour Rockefeller. Là encore, il souhaite faire revivre l’ambiance chic des clubs du dix-neuvième siècle, enrichie d’une touche plus moderne. C’est Dale qui devient le chef barman de ce lieu considéré par de nombreux architectes comme le plus réussi de New York. Pour la carte, il revisite des cocktails classiques tels que le Old Fashioned ou le Sazerac et prend le parti de n’utiliser que des alcools de qualité et des produits frais.
C’est ainsi qu’il est considéré comme le père de la mixologie. Au-delà de cet aspect, Dale DeGroff est également réputé pour avoir remis au cœur du métier de barman l’importance de la gestuelle et de l’écoute des attentes du client.
Il est, en outre, l’auteur de deux livres de référence : The Craft of the Cocktail (2002) et The Essential Cocktail (2009).